Jellyfish ou nos mondes mouvants
de Loo Hui Phang
Création 2020 – Comédie de Caen, CDN de Normandie
Mise en scène et scénographie : JF Auguste
Collaboratrice artistique : Morgane Bourhis
Avec : Xavier Guelfi et Shannen Athiaro Vidal
Musique : Joseph D’Anvers
Lumières : Niko Joubert
Costumes : Frédéric Baldo
Co-productions
La Comédie de Caen CDN de Normandie, L’Entresort CNCA – Centre National pour la Création Adaptée de Morlaix, Les Passerelles Scène de Paris Vallée-de-Marne
Avec le soutien du Théâtre Joliette, Scène conventionnée art et création, expressions et écritures contemporaines à Marseille, dans le cadre des résidences de création
Avec la participation artistique du Studio d’Asnières-ESCA
Avec le soutien du département de Seine-et-Marne (77) dans le cadre de l’aide à la création
Ce texte est lauréat de l’Aide à la création de textes dramatiques – ARTCENA
L’adolescence est l’ère de tous les possibles, de tous les excès, de tous les extrêmes. Tiraillée entre la nostalgie de l’enfance et l’envie d’émancipation, la curiosité du monde et les peurs qu’il peut susciter, c’est une période d’initiation douloureuse, où l’innocence le dispute aux désillusions, et donc à l’expérience. Les mutations irréversibles qui l’accompagnent – physiques, relationnelles et psychologiques – sont à la fois sources de répulsion et d’émerveillement. C’est ce merveilleux de l’adolescence, contradictoire et trouble, que Jellyfish explore.
Peinture de la jeunesse contemporaine, aux résonances fantastiques, la pièce emprunte les codes de la culture populaire, du manga aux comics américains, du grunge au gothique. Il donne à voir une synthèse de l’esthétique adolescente, tel un scanner mental mettant à nu les univers mentaux sécrétés durant cet âge sensible. Les réseaux sociaux, outils désormais intrinsèques du quotidien des adolescents, ont également provoqué une mutation dans le langage, à la fois dans sa fonction d’interaction mais aussi dans le rapport à soi-même. La surmultiplication des informations en circulation, la mise en scène de l’ego, la quasi-simultanéité des évènements et de leur diffusion, bousculent la notion d’intimité, la faisant basculer vers celle d' »extimité »1. Dans son écriture, Jellyfish traite également de cette métamorphose du langage, des vocabulaires, des formes de discours.
Spectacle tout public, Jellyfish est une photographie mentale de la jeunesse d’aujourd’hui, de ses métamorphoses, de ses inquiétudes et de ses désirs, une plongée dans un monde lui-même en mutation. C’est une peinture de l’adolescence et de ses marqueurs immuables – son énergie pulsionnelle et son immense capacité d’invention -, aux prises avec un monde mouvant, insaisissable, aussi fascinant qu’angoissant. Etre adolescent, c’est être « un autre », pour reprendre la formule rimbaldienne. La métamorphose intime provoque ce déplacement intérieur : être étranger à soi-même, au monde familier, exilé de sa propre enfance, devenir un individu singulier, unique. Cette différence devient une identité.
1 Après Lacan, l’extimité, par opposition à l’intimité, est, tel qu’il a été défini par le psychiatre Serge Tisseron, le désir de rendre visibles certains aspects de soi jusque-là considérés comme relevant de l’intimité.